Voyage au coeur du Canigou
Voici une vocation bien atypique qui a fait de Claude Sarda un fervent défenseur des traditions. Il y a une dizaine d’années, il a décidé de reproduire une recette ancestrale, celle du sirop de sapin. Apprécié pour ses vertus médicinales, ce sirop a aussi su séduire les Chefs qui se l’arrachent aujourd’hui. Rencontre avec un homme pas comme les autres.
Un produit original
Nichés à 1700m d’altitude, au cœur du Massif du Canigou dans le Parc Naturel des Pyrénées Catalanes, les cônes de sapins sont récoltés à la fin de l’été, entre la mi-août et la mi-septembre. Gorgés de sève et de résine, ils font le bonheur de Claude.
Ces cônes poussent tout en haut des sapins Abies (sapin) Alba (blanc), à près de 35m de hauteur. Pour les récolter, Claude sollicite des grimpeurs, ses “vendangeurs du vertige” comme il aime les appeler. Puis il redescend sa récolte au village.
Installé à Sahorre, petit village de basse montagne, dans son atelier artisanal, avec son équipe, il élabore son sirop de sapin comme le faisaient les Anciens, par une macération des cônes de sapin dans du sucre de canne bio. Pendant trois mois (minimum) il laisse patiemment le sucre capter la sève et la résine des cônes et obtenir naturellement le sirop. “Plus on laisse macérer, plus on récupère de choses intéressantes (huiles essentielles, polyphénols, oleo résine) … La macération peut durer jusqu’à une année” nous précise Claude. Ce sirop était autrefois utilisé en hiver pour ses vertus médicinales, mais les chefs l’utilisent maintenant en pâtisserie et en cuisine. “Il est rare d’avoir un produit dont les vertus préventives et pharmaceutiques présentent un intérêt pour la cuisine et la pâtisserie”.
Du vin au sapin
Pourtant, son parcours ne le prédestinait pas à ce métier original. Fils, petit-fils, arrière-petit-fils de vignerons d’un petit village des Corbières Catalanes, Claude sait qu’il ne prendra pas la suite familiale dans les vignes. Après des études en Sciences Économiques, il quitte le Roussillon pour sa première expérience à l’étranger, en Belgique, pendant 4 ans.
Revenu en Pays Catalan, il construit sa carrière dans le commerce du vin en France et à l’international pendant 25 ans. Et c’est en Andorre qu’il découvre le sirop de sapin, presque disparu, et que l’idée de le sauvegarder et le relancer en France, va lentement germer.
Des produits de Chefs
Naturellement, après la première production en 2013, il se tourne vers le milieu pharmaceutique, pour proposer et vendre ce sirop aux vertus préventives et antioxydantes. Puis petit à petit, il développe une gamme originale et unique au monde de produits gastronomiques (vinaigres, crème balsamique, poivre, huiles…) et se rapproche de la restauration… “Mon père faisait son propre vinaigre, j’ai voulu l’imiter”.
Aujourd’hui, il propose deux vinaigres, l’un Doux et Fruité dans lequel il préserve un peu de sucre résiduel qui apporte des notes de petits fruits rouges (fraises, mûres, cassis) … Et le second, un Extra sec, qui subit une fermentation complète (tout le sucre est transformé en alcool) et présente des notes d’eucalyptus, menthol et de montagne.
En partenariat avec l’école SupAgro de Montpellier, il développe deux huiles de sapin pour répondre à la demande de plusieurs chefs. À partir d’huile de tournesol bio désodorisée, dans la première, il fait macérer des cônes de sapin séchés qui apportent des notes intenses et boisées. Dans la deuxième, les cônes sont remplacés par des bourgeons de sapin offrant à l’huile des notes végétales, fruitées et délicates. Chaque macération dure environ un mois.
Qui a déjà goûté un sirop de sapin ? Certainement peu d’entre nous. Voilà pourquoi il ne vous reste plus qu’à goûter à ce savoir-faire unique.
Ce qu’il faut retenir
#1 Claude a sauvegardé et relancé une recette traditionnelle de nos Anciens
En faisant perdurer la recette du sirop de sapin bien connue dans les Pyrénées catalanes.
#2 Réutilisation des déchets
Ils réutilisent et valorisent les cônes qui ont servi à élaborer le sirop pour préparer ses huiles, puis ensuite pour des fumaisons (poissons et viandes).
#3 Une production 100% artisanale
Les techniques de récolte ne pourront jamais s’industrialiser, car elles demandent aux grimpeurs de se hisser à 35m de haut, sur des terrains pentus, pour récolter, un à un, les cônes de sapins et limite ainsi la production à des volumes réduits.
#4 Un produit 100% naturel
Récoltés dans le Parc Naturel des Pyrénées catalanes, en partenariat avec l’ONF, les sapins sauvages ne sont soumis à aucun traitement. Certifié bio depuis 2015, il n’utilise ni additif, ni conservateur.
Publié le 13 février 2023 par Florence Dupin