Si vous passez par Saint-Jean-de-Luz, dans le Pays-Basque, et que vous aimez le fromage, impossible de ne pas vous arrêter dans la fromagerie de Beñat, fromager-affineur bien connu dans la région. Tombé amoureux de fromages il y a une dizaine d’années, celui qu’on appelle plus communément Beñat, est spécialisé dans les fromages des Pyrénées.
Son métier, sa passion, il la doit à la mère de l’un de ses amis. “Je travaillais dans une entreprise de nettoyage. La mère d’un ami tenait un stand de fromages à Saint-Jean-de-Luz, quand je suis allé la voir j’ai su que ce serait mon métier” raconte Beñat.
“Alain Ducasse a été le premier à me faire confiance, il est toujours mon client aujourd’hui !” raconte-il fièrement. Et fier il peut l’être, car les fromages qu’il propose sont extraordinaires. La preuve en est, de nombreux Chefs lui font aujourd’hui confiance, à l’instar d’Alain Ducasse ou encore de la délicieuse Hélène Darroze.
Je peux pas, j’ai estive
Amoureux de la nature, sensible au travail des bergers, il part régulièrement à la rencontre des hommes et des femmes avec lesquels il travaille. Il raconte d’ailleurs volontiers leur histoire. Avec Beñat nous avons rencontré l’un d’eux : Jean-Bernard Maitia, berger et fervent défenseur du fromage d’estive.
Un fromage d’estive est un fromage issu d’une cabane, d’un producteur, d’un troupeau et d’un parcours. “Chaque berger propose un fromage différent” précise Beñat.
Jean-Bernard élève près de 250 brebis tête noire, burubeltza. Chaque année, autour du mois d’avril, il part en estive, à 1200 mètres d’altitude, sur les crêtes d’Urkulu. Huit heures de marche plus tard, il pose ses valises dans sa petite maison. Il y séjourne près de cinq mois. Les journées sont longues (elles démarrent au petit jour vers 6h30 et se terminent à la tombée de la nuit vers 22h). “Je trais mes brebis à la main une fois par jour” dit-il avec son accent basque. “Je travaille différemment de mon père, qui était aussi berger. Ce que je veux faire c’est vendre ce que je mange. Je ne cherche pas la productivité à tout prix. Il y a moyen de faire les choses correctement et d’en vivre” dit-il. “Mes brebis mangent de l’herbe en pâturage pendant 5 mois. La qualité de l’alimentation influence le goût des fromages, c’est une évidence”. “Il n’existe pas d’herbe plus pure” ajoute Beñat.
Une fois le lait récupéré lors de la traite quotidienne, celui-ci est immédiatement transformé en fromage. “Plus ils passent de temps en cave naturelle (en estive), plus les fromages auront le goût d’ici” nous confie Beñat. Les tommes obtenues, pâte pressée non cuite, sont frottées à l’eau et au gros sel (pour former la croûte), puis sont frottées, une fois par semaine, à l’aide d’un torchon. Ses tommes offrent des saveurs et des arômes uniques.
Être fromager-affineur
Dans sa cave, Beñat affine des centaines de fromages. Sur de petites étagères trônent des tommes de brebis, des tommes de chèvre, des tommes de vache, des osso iraty, des fromages à pâte persillée, des fromages à pâte molle, des fromages fumés… surtout des fromages des Pyrénées et bien d’autres encore. “Certains fromages de brebis commencent leur affinage en cave naturelle, comme chez Jean-Bernard, d’autres sont fabriqués avec des brebis qui restent près des fermes (en plus basse altitude). Pour les affiner je les observe, parfois je les goûte”. Il détermine ainsi le meilleur moment pour les mettre en vente.
Le métier de fromager-affineur est un métier de patience. Seule l’expérience, le temps, l’observation, les dégustations et les rencontres permettent de forger son savoir-faire. Beñat nous offre ici l’occasion de retrouver des fromages basques au goût de la nature. Un régal !
24 novembre 2021 / Florence Dupin